La société, qui se positionne sur le même créneau que des géants des paiements électroniques tels que PayPal, Western Union, et le Français Wordline, est confrontée à une crise sans précédent, marquée par des enjeux d'une envergure peu commune dans le milieu des affaires.
Sur le chemin tumultueux du succès, Wirecard s'est vue entraînée dans une spirale d'erreurs et vit une inattendue sortie de route. Cette entreprise allemande, spécialisée dans le traitement des paiements électroniques, a récemment admis avoir subi des irrégularités comptables considérables, avec près de 2 milliards d’euros qui semblent avoir disparu des comptes. Son ancien PDG, Markus Braun, a été arrêté le mardi 23 juin, ajoutant à la gravité de la situation.
2 milliards d'euros absents, et une chute vertigineuse de son action
Au cours de la journée précédente, Wirecard a rapporté la présence d'une somme de 1,9 milliard d'euros dans ses comptes, mais il s'avère que cette somme ne trouve aucun fondement. Il s'agit d'un véritable gouffre financier. L'entreprise, qui emploie environ 6 000 personnes et affichait un chiffre d'affaires de 2 milliards d'euros en 2019, est désormais confrontée à une crise dévastatrice dont l'issue pourrait s'avérer fatale.
Tout a débuté le 19 juin avec la démission de Markus Braun, alors qu'il était encore le dirigeant du groupe. Deux jours plus tard, lors de la nuit du 21 au 22 juin, Wirecard a découvert ce trou abyssal de presque 2 milliards d'euros, inexpliqué, ce qui a entraîné une chute spectaculaire de son action (l'entreprise est cotée sur le DAX, l'indice boursier allemand) de 104 euros le 17 juin à 14 euros le 22 juin, pour finir à 17,16 euros lors de la clôture de ce mardi, poussant sa valorisation à la baisse de 11 milliards d'euros.
Cette firme allemande, réputée dans le domaine des paiements électroniques – que ce soit pour le e-commerce, le traitement des cartes bancaires, les prélèvements SEPA, ou encore la prévention des fraudes et l'évaluation de la solvabilité – comptait parmi ses clients de grandes marques telles que Visa, Mastercard, Orange, et le groupe mutualiste français Crédit Agricole, dont les relations s'étaient quelque peu détériorées fin 2019.
Les médias allemands avaient sonné l'alarme auprès du régulateur ces dernières années, mais sans succès
Bien que la fintech ait déclaré avoir été victime d'une fraude d'envergure, l'argent censé être déposé sur des comptes bancaires aux Philippines reste introuvable, tout comme l'avocat censé surveiller les opérations financières de l'entreprise.
L'ancien dirigeant de Wirecard, Markus Braun, a été remis aux autorités après qu'un mandat d'arrêt ait été émis à son encontre, l'accusant d'avoir artificiellement gonflé le bilan de la société pour la rendre plus attrayante aux yeux des investisseurs et des clients. Sa caution a été fixée à 5 millions d'euros, et il pourra retrouver la liberté dès que ce montant sera intégralement versé.
Actuellement, tous les regards se tournent vers la BaFin, l'Autorité fédérale de supervision financière, qui subit elle-aussi des critiques acerbes de la part du public et des experts du secteur. Le dirigeant de cette autorité, Felix Hufeld, a qualifié cette situation de « honte » et de « désastre complet » pour l'Allemagne. « De nombreuses institutions, qu'elles soient privées ou publiques, dont la mienne, n'ont pas été suffisamment réactives pour empêcher qu’une telle tragédie se produise », a-t-il déclaré, alors que le modèle économique de Wirecard avait déjà soulevé de nombreuses interrogations dans les médias au fil des années, sans que les autorités ne réagissent. Aujourd'hui, elles se retrouvent dans l'obligation de faire face à cette crise majeure.